Vitesse, lenteur

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La vie, c’est du changement, c’est à dire de la variation en fonction du temps. A la vie, il faut donc associer l’idée de vitesse :

·        Vitesse d’évolution

·        Vitesse de croissance

·        Vitesse de déplacement

En général (c’est probablement l’héritage d’une impatience typiquement moderne), nous sommes tentés d’attribuer des connotations positives à la vitesse, et par contrecoup à considérer la lenteur comme négative, et pour faire l’inverse, il faut des raisons fortes. L’exemple des limitations de vitesse sur route est assez parlant : en premier lieu, nous voulons des transports rapides, considérant le temps de trajet comme perdu, et il faut ensuite, face aux accidents liés à la grande vitesse, revenir à l’idée de limites, qui du reste ont du mal à s’imposer.

Le sport valorise la vitesse, il n’y a pas de compétition lente.

La Nature quant à elle, a ses mesures de temps. Certains processus sont certes rapides, mais d’autres ne peuvent être que lents et progressifs, voire très lents, presque imperceptibles. Nous sommes souvent admiratifs devant la vivacité, voire la violence que montre parfois la Nature, mais bien plus souvent aussi nous avons la démonstration de son extrême patience, ou de sa lente obstination. Cela tient non pas à une question de vertu, mais aux propriétés physiques ou chimiques de la matière inerte ou organique, et à l’échelle des ensembles considérés. Une observation correcte montre que chaque système naturel ou biologique a son rythme, qui s’il n’est pas respecté, mène à des crises plus ou moins étendues. La Nature a recours à toute la gamme des vitesses.

L’activité humaine est imbriquée dans la biosphère, et sous peine de déclencher ou de subir de telles crises, elle doit se conformer (au moins en partie) aux rythmes de cette biosphère. En particulier, le temps de renouvellement des différentes ressources que nous tirons de la Nature devrait régir le rythme de leur utilisation. Dans certains cas, nous savons nous conformer à la lenteur que nous impose la Nature. Les cristaux les plus parfaits doivent se solidifier lentement, le bois de lutherie ne pousse que lentement, il faut patienter des années pour qu’un jardin soit beau, ou pour qu’une vigne donne son meilleur.

Mais la patience de la Nature, ou la parcimonie de ses rendements s’accommodent de plus en plus mal avec les exigences de nos sociétés de compétition. C’est toute la question de l’énergie et des réserves de matières premières, de leur épuisement ou de leur renouvellement. Jusqu’à un certain point, l’homme parvient par son action sur l’environnement à jouer un rôle accélérateur qui lui permet d’augmenter « à son profit » la productivité ou les rendements d’exploitation.

Ce profit, c’est apparemment de la croissance démographique, l’amélioration du confort et du plaisir de vivre, la production d’une culture, mais aussi du divertissement, ou la concrétisation de rêves divers. Et pour l’instant, il se paye par un dépassement intenable des rythmes naturels.

Avec la promotion de la vitesse, l’humanité a-t-elle, comme le dit Nicholas Georgescu Roegen choisi de mener une vie brève mais excitante, laissant aux espèces moins ambitieuses une existence longue, mais monotone ?

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