Le renouvelable, c’est un moyen de concilier la finitude de
notre monde avec la durée longue (infinie ?). On retrouve cette logique
dans l’intérêt pour ce qui est cyclique. Mais si on analyse bien, il faut
entretenir les cycles, alimenter leur fonctionnement de façon suffisamment permanente, car aucun cycle n’est à bilan totalement nul. Cela
fait qu’en toute rigueur, le cyclique, le renouvelable n’est pas indéfiniment
durable. Il l’est tant que les sources d’alimentation du cycle durent. Pour
notre monde, c’est principalement l’énergie nucléaire du soleil, puis l’énergie
cinétique des planètes (dont la Terre) dans le champ de gravité du soleil et
plus minoritairement l’énergie des réactions dans le noyau terrestre qui
permettent l’entretien de nos ressources renouvelables. Leur durée prévue,
quoique finie, dépasse largement l’horizon d’action actuel de l’humanité.
N’ayons pas trop de préoccupation de l’épuisement du combustible solaire ou du
dérèglement des orbites planétaires et du risque d’une collision
catastrophique, car l’urgence est avant tout de parer à l’épuisement des
réserves terrestres.
Sur Terre, est renouvelable ce qui se régénère en un temps pas
trop long (par rapport à nos activités) : tout ce qui a trait au flux
d’énergie apporté par le Soleil, qui est lié aux cycles climatiques, aux
saisons, et notamment aux ressources développées par l’activité biologique (à
condition que les interventions ou les prélèvements ne la mettent pas en
danger). L’exploitation du cycle de l’eau, des mouvements atmosphériques, l’exploitation
directe du rayonnement solaire, à plus long terme, l’exploitation du bois et de
la végétation, du règne animal. La cueillette, la chasse, la pêche,
l’agriculture, l’exploitation forestière sont durables si elles permettent à la
vie de se régénérer sans se détériorer.
Si à l’inverse, une activité dépasse en ampleur la capacité
naturelle de régénération, elle consomme nécessairement des stocks épuisables.
Sa durabilité est alors limitée au temps d’épuisement de ces stocks et
tributaire des conséquences de leur disparition.
On a tendance à penser que les civilisations anciennes
n’exploitaient que des ressources renouvelables, ce qui est majoritairement le
cas, mais il y a aussi de nombreux exemples, même dans un passé lointain de cas
où la nature a été mise en crise, comme des exemples anciens et attestés de
déforestation, d’extinctions d’espèces, d’épuisement des sols ou des
sous-sols. Le problème ne s’est alors résolu que par du nomadisme, des crises
ou des mutations de civilisation. La crise écologique actuelle répond à la même
logique, mais elle est plus importante en ampleur, notamment parce qu’elle
concerne une humanité mondialisée aux moyens d’intervention rendus puissants
par l’amélioration des techniques et l’exploitation de l’énergie fossile.
Aujourd’hui, il est encore possible d’envisager une civilisation
humaine capable de fonctionner sur le renouvelable sans renoncer aux apports
essentiels du progrès. Si nous sommes assez ingénieux (et nous devrions y
croire), le flux d’énergie solaire est assez généreux pour nous approvisionner
de façon durable, même en tenant compte des faibles rendements d’exploitation
et de sa répartition diffuse. Si nous savons mesurer notre impact, la biosphère
est encore assez productive pour que nous puissions l’exploiter sans l’épuiser.
Mais pour opérer la mutation de civilisation, nous avons besoin d’une véritable
révolution mentale pour nous détourner d’un faux progrès myope, gaspilleur et
irresponsable.
Le changement est déjà amorcé, on ne peut que souhaiter qu’il
s’accélère et que la confiance dans un avenir renouvelable devienne générale.