HISTOIRE DU FER DANS L’ARCHITECTURE

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Le fer est un métal  assez lourd,  de très bonne résistance mécanique, ayant une grande propension à se combiner  avec l’oxygène. C’est un élément  très abondant sur la Terre, mais très rare naturellement à l’état pur. Pour obtenir du fer en quantité notable, il faut extraire les minerais et les traiter, ce qui nécessite une grande dépense en énergie et en carbone combustible.

La production et l’usage du fer sont des facteurs essentiels dans l’évolution des civilisations, et notamment dans la naissance de l’industrie.

Le fer est utilisé par l’homme depuis très longtemps, mais il ne devient  un matériau important en structure de bâtiment que tardivement (vers les XVIII e et XIX e siècles).

Débuts de la métallurgie

La métallurgie est née probablement vers 5000ans avant J.C., grâce à la forte chaleur obtenue dans les fours de potiers (la céramique date du néolithique, environ 6000ans avant JC)

Au départ, elle concerne surtout le cuivre, l’or, ou le plomb, dont la fusion s’obtient vers 800°C, la chaux ayant pu aider à la réduction des minerais. Le métal, en petites quantités, est travaillé pour des bijoux par martelage et fonderie.

Le bronze, mélange de cuivre et d’étain, a aussi une température de fusion basse tout en étant relativement dur, ce qui permet des usages plus techniques. On le trouve vers 3000 avant J.C. en Mésopotamie.

Commencements du fer

Le fer, métal très dur (et un peu moins lourd que le bronze) nécessite pour son obtention de fortes températures et de grandes quantités de charbon. Il apparaît (sous sa forme non native) aux environs de 1500 avant J.C. dans le sud du Caucase (actuelle Arménie) chez les Chalybes qui sont sous domination Hittite. Ses qualités pour fabriquer armes et outils feront le succès des Hittites, et la technique du fer se répandra vers 1000 à 500 avant J.C. dans l’Europe du Nord et de l’Ouest, riches en minerais et en forêts. Le fer se développera également en Egypte et en Afrique, mais pour des usages limités, faute de bois.

Vers l’Est, la Chine développe dans les mêmes périodes une métallurgie du fer plus orientée vers la fonte, les chinois maîtrisant bien les conteneurs réfractaires et les fortes chaleurs (soufflets animés par des roues à aubes). De plus, les minerais des chinois donnent un fer à fusion basse, chargé en phosphore.

En Europe, le fer supplante le bronze dans bien des usages techniques (armes et outillage), mais les quantités produites restent encore assez limitées.

Les freins à une exploitation plus importante sont la nécessité de disposer de beaucoup de bois, et les difficultés d’exploitation des mines (creusement, étaiement, pompage des eaux souterraines  infiltrées).

Dans les cultures anciennes, le forgeron n’en est pas moins un personnage important, chargé de mythes.

Le fer, obtenu sous forme de fonte dans de petits fourneaux (1,3m au Moyen Age) où sont mélangés charbon de bois et minerai,  est ensuite martelé, et donc forgé, pour être mis peu à peu en forme.

On distingue :

       La fonte, fortement chargée en carbone, moulable mais cassante

       Le fer, résultant du puddlage ou du forgeage, plus malléable, contenant très peu de carbone  et pouvant être soudé par forgeage à chaud

       L’acier, à la teneur en carbone intermédiaire entre fonte et fer, plus régulier et plus dur, et élastique. Il n’est obtenu qu’en petites quantités (par cémentation ou damassage) et est réservé aux usages les plus nobles.

En construction, le fer est utilisé en faibles quantités principalement:

       Pour des pièces de renfort et d’assemblage (chaînages, tirants, étriers, crampons, clous, etc…),

       Pour les charnières, serrures, crémones des portes et fenêtres

       Pour les grilles, garde-corps, et autres ouvrages décoratifs en fer forgé ou en fonte

       Pour des tuyaux en fonte, des appareils, poêles, etc…

Naissance de l’industrie

Vers le milieu du XVIII e siècle, l’exploitation s’étant accrue, l’Angleterre (et à sa suite d’autres pays d’Europe) se trouve confrontée à une importante pénurie de bois. Un haut-fourneau produit en un mois 5m3 de fer mais en consommant un hectare de forêt. La production du fer se tourne donc vers l’exploitation du charbon souterrain (la houille) qui sera utilisée  dans les hauts-fourneaux sous une forme « raffinée », le coke (carbone assez pur et moins sujet à l’écrasement ) inventé par Darby en 1735.

La demande de nouveaux outils pour la mine, les possibilités offertes par la production accrue, la mécanisation, notamment dans les transports, entrent en synergie et le fer devient accessible à des usages techniques impliquant de grandes quantités. C’est un des facteurs de la naissance de la civilisation industrielle.

En 1779, le premier pont en fer à Coalbrookdale sur la Severn dessert une mine, il est en fonte, conçu selon un mode de construction un peu apparenté à la charpente de bois.

Les premières structures porteuses en fer comme la charpente du Théâtre de Bordeaux (1786), la passerelle des Arts à Paris (1801), la coupole de laHalle aux Blés (1809) sont également en fonte.

Les profils laminés datent de 1820-1830 et ils seront utilisés en association avec les pièces moulées (pour les assemblages et les ornements). Des serres mettent en valeur la finesse des ossatures métalliques, et les grandes halles ou les premières grandes gares révèlent leur capacité à franchir de grandes portées.

La fonderie Bogardus de New York est créée en 1849. Elle produit des collections complètes d’éléments destinés au bâtiment et notamment des façades d’immeubles entièrement en fonte.

L’acier industriel

Pour obtenir de l’acier, il faut diminuer la proportion de carbone contenue dans la fonte. Pour cela, on peut combiner le carbone excédentaire à de l’oxygène ou ajouter du fer à faible taux de carbone .

La mise au point de procédés industriels pour l’acier dans la deuxième moitié du XIX e siècle ne rend pas pour autant ce matériau immédiatement accessible à la construction.

Les procédés Bessemer (1855), Martin (1865) puis Thomas (1878) dérivé de Bessemer, fournissent des matériaux pour les outils et les machines, mais la Tour Eiffel de 1889 est encore en fer riveté.

La transition se fera aux USA vers 1893 et en France à partir de 1895. L’acier, plus cher et moins facile à travailler, devient accessible. Il est plus résistant et surtout plus régulier en qualité que la fonte.

Grâce aux presses pneumatiques et hydrauliques, le rivetage survit encore quelques décennies (malgré la difficulté à forger les gros rivets).

Les assemblages boulonnés ne deviennent fiables qu’avec la bonne maîtrise des aciers. La soudure, difficile à maîtriser du fait des déformations thermiques, ne sera vraiment avantageuse que plus tard sous sa forme électrique, nécessitant  des générateurs et des électrodes  appropriées.

Fer et architecture

Dans le bâtiment, le fer est au début caractéristique de programmes  plutôt utilitaires ou non conventionnels: Serres, grandes halles, gares, usines, grands magasins, sans oublier les expositions universelles : Crystal Palace à Londres en 1851, expos de 1867 puis de 1878 à Paris. Les bibliothèques de Labrouste à Paris, ou les églises de Boileau font figure d’exception.

Pour les structures à étages, les premiers pas sont faits à Chicago, après le grand incendie de 1871 qui déclenche  un boom immobilier. Les immeubles de bureaux à ossature métallique sont développés par William Le Baron Jenney (1879) et ses successeurs, donnant ainsi naissance aux premiers  gratte-ciel.

Pour ces nouveaux édifices comme pour les programmes traditionnels d’architecture savante, la finesse des ossatures de fer et l’augmentation du nombre d’étages remettent en cause les systèmes de proportions. Dans le même temps, la production industrielle change la conception de l’ornementation. Après quelques décennies à la recherche de solutions stylistiques (éclectisme ou Art Nouveau) l’émergence de la doctrine moderne  imposera peu à peu un langage rationnel et épuré qui trouvera son apogée dans les années 1955-1965 avec  notamment L. Mies Van der Rohe et ses émules  proches ou lointains.

La charpente en acier est désormais un des principaux modes de construction contemporains. Son rôle a notamment été essentiel en combinaison avec le verre dans la quête de la transparence qui a marqué les XIX e et XX e siècles.

On notera en parallèle l’importance primordiale de l’acier dans le béton armé, et les changements que les pièces métalliques industrielles ont apportés dans la conception des structures en bois.

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